
Au fur et à mesure
Qu'est ce qu'il me passe donc par la tête?
Revenons à la méthodologie visant à évaluer dans quelle mesure un système de captation sonore perturbe le signal local de pression acoustique, sachant que la microphonie est intrinsèquement intrusive. Ce phénomène dépend également de la direction d’arrivée de l’onde sonore — c’est-à-dire de l’angle relatif entre son vecteur et l’axe de référence du dispositif — tant en azimut (plan horizontal) qu’en élévation (plan vertical). Ainsi, pour un microphone au ras du sol, la zone d’observation couvre une demi-sphère supérieure, tandis qu’en prise aérienne (overhead), elle englobe une sphère complète autour du dispositif.
Pour mieux saisir l’impact de la tête artificielle sur les perturbations sonores — étape clé vers la compréhension binaurale — deux approches sont envisageables :
- une mesure en chambre anéchoïque, offrant un flux acoustique laminaire dont la durée peut être ajustée selon la précision requise, particulièrement en basses fréquences ;
- une mesure de la première réponse impulsionnelle, réalisée dans un champ acoustique plus ou moins diffus, sur un plan réfléchissant.
Cette méthode, simple et rapide, permet de collecter des données avec un intervalle temporel très court (<1 ms), correspondant approximativement au temps nécessaire à l’onde sonore pour traverser la tête artificielle. Toutefois, en raison de la brièveté de la fenêtre d’observation, la réponse ne peut être correctement caractérisée qu’au-delà de 700 Hz.
Comme le domaine binaural d’intérêt s’étend généralement de 1 kHz à 10 kHz, les fréquences moyennes et basses seront évaluées par des essais en extérieur ou par l’enregistrement continu des séquences de test, permettant des analyses spectrales plus approfondies — ou même par écoute critique.
Faute d’accès à une chambre anéchoïque, je privilégie cette approche pour toutes les futures mesures effectuées à domicile.
Logiciel utilisé : SampleChampion de Purebits (références disponibles dans la section « L’œil du son »). Microphone d’étalonnage : B&K type 4190. Que ce soit en intérieur ou en extérieur, avec un haut-parleur de test X ou Y, la première étape consiste à calibrer la séquence MLS afin d’obtenir, au niveau du point de placement du microphone, une impulsion nette et sans oscillation — garantissant un front d’onde sonore à réponse suffisamment plane dans la bande fréquentielle ciblée. Cette méthode permet aussi d’annuler les premières réflexions sonores provenant du sol et des parois environnantes, ainsi que les déphasages initiaux liés à la technologie du haut-parleur utilisée.
Ensuite, selon le principe de substitution, on remplace le micro d’étalonnage par la tête artificielle, en supposant que le premier front d’onde qui l’atteint sera linéaire, et que le signal capté par les micros d’oreilles (ou frontaux) reflétera fidèlement la réponse induite par la morphologie du dispositif. Je reviendrai ultérieurement sur cette distinction fine entre aspects anthropomorphiques et anthropométriques d’une tête artificielle.

Je vous renvoie à l’image des vagues successives qui s’étendent sur l’eau tranquille d’un étang, partant du point où le caillou a frappé, s’épanouissant en cercles concentriques, puis faisant danser le bouchon de pêche à leur passage. C’est son oscillation, qui s’atténue progressivement jusqu’au retour du calme, qui symbolise la réponse acoustique du microphone face aux ondes sonores arrivant depuis n’importe quel angle. Poétique, n’est-ce pas ?

Maintenant, commence la réflexion sur l'interprétation de ce que l'on mesure et de ce qu'on va en faire ensuite en terme d'égalisation, d'alignement temporel, etc.
A contrario, d'un point de vue créatif, il est tout autant possible d'ignorer la mesure et d'utiliser l'effet de la perturbation du signal sonore dans un processus d'appropriation subjective et d'intégration dans un schéma sonore ou musical.
Umami.